Ave Maria - G.Caccini

Réforme des retraites : les Français méritent leur faillite !

 


Cette semaine (à haut risque pour Barnier), l’Assemblée Nationale doit discuter d’une proposition de loi déposée par la France Insoumise visant à abroger la réforme des retraites imposée par Macron au forceps en 2023. On le sait depuis deux ans, bientôt, cette réforme est un véritable nœud gordien qui bloque le débat public. La proposition LFI a toute chance de passer… Nous vous expliquons aujourd’hui pourquoi cette proposition est suicidaire… et pour quoi les Français méritent qu’elle passe. Les conséquences à payer seront si lourdes qu’elles obligeront l’opinion publique à « atterrir » et à mûrir face aux marchands de rêve. 
On connaît par cœur les arguments utilisés par les avachis, les opportunistes de tous poils, les démagogues et les marchands de rêve pour disqualifier toute réflexion sérieuse sur le système de retraite en France. D’une manière générale, ces arguments oscillent entre le déni de l’autruche (le problème des retraites serait inventé pour faire plaisir à des tas de gens, et on saluera ici la thèse bouffonne selon laquelle il s’agirait d’un complot de Black Rock pour récupérer la gestion de notre système moribond) et la plus parfaite incohérence dans la vision de la protection sociale. 

Par exemple, il est de bon ton de diaboliser la retraite par capitalisation, mais nous ne manquons pas de sophistes pour expliquer qu’il faudrait asseoir les recettes du régime des retraites sur la « productivité », concept que bien peu de défenseurs de cette théorie seraient capables de définir avec précision. Or, qu’est-ce que la productivité, sinon l’introduction notamment de la production des « robots » dans le financement de la sécurité sociale ? Et qu’est-ce qu’un robot, si ce n’est du capital ?


Ainsi, la retraite ne peut se fonder sur la rémunération du capital, parce que le capital c’est moche, sauf quand le capital permet de financer la retraite collective obligatoire, ou, tout à coup, il se pare de toutes les vertus. Vérité du jour, erreur du lendemain, et vice-versa. Tout est bon pour défendre farouchement la retraite par répartition, y compris en l’asseyant sur le capital. 

Et, bien entendu, aucun de ces apprentis-sorciers ne juge utile de mentionner que la productivité est un facteur éminemment volatile. Lorsque la productivité s’accroît, ce sera très positif pour le financement des retraites. Lorsqu’elle baisse, on doute fort qu’il existe un consensus à gauche pour baisser les retraites à due concurrence. 

Des règles du jeu pourtant simples à comprendre

Les défenseurs de la retraite par répartition adorent s’arc-bouter sur l’héritage (prétendu) du Conseil National de la Résistance, comme s’il s’agissait d’une nouvelle religion qui ne souffre aucun forme d’hétérodoxie. 

Rappelons-le, la retraite par répartition fut une création du régime de Vichy en 1941, pour des raisons « tactiques ». Dans la France occupée, le chômage sévissait, et l’invention de la retraite par répartition donna l’illusion qu’elle permettait de libérer des emplois pour des chômeurs en âge de travailler. 

Mais qu’importe : création de Vichy ou du CNR (dans la pratique, Pierre Larroque avait été conseiller ministériel sous Vichy avant de revenir dans les bagages de De Gaulle), le sujet n’est pas là. Le problème est que la répartition obéit à des règles simples qui ne sont plus structurellement soutenables aujourd’hui, et notre pays avachi fait tout pour nier cette évidence…

Ainsi, dans la répartition, les actifs cotisent pour payer les rentes des retraités. C’est une mécanique simple et en même temps très mal comprise aujourd’hui. 

D’abord, elle signifie que nous ne cotisons pas pour notre propre retraite, mais bien pour les autres. On entend souvent les Français dire : « j’ai cotisé toute ma vie, donc j’ai droit »… Sauf que non : les cotisations servent aux retraités, pas aux cotisants… Le fait d’avoir cotisé toute sa vie n’ouvre aucun droit à percevoir une retraite soi-même le moment venu, en dehors d’un calcul de droits très théorique.

Ensuite, elle signifie que notre système de retraites n’amasse rien, qu’il ne thésaurise rien. Tout ce qui est cotisé est immédiatement dépensé pour payer les rentes des assurés. C’est précisément ce qui pose problème : structurellement, notre système de retraites est exposé à un risque de trésorerie bien connu de nos lecteurs. 

En tout cas, le fantasme pitoyable selon lequel Black Rock et quelques autres intrigueraient pour récupérer ce système de pauvre, d’impécunieux, n’a aucun sens. 
Question centrale de la natalité et de la durée de carrière

Dans ce dispositif d’ensemble, on connaît la règle mathématique très simple qui permet à la retraite par répartition de durer : il faut qu’il y ait suffisamment de cotisants pour financer les retraites chaque mois, c’est-à-dire suffisamment d’actifs. 

Combien au juste ? tout est une question de choix logique. 

Soit on veut des cotisations raisonnables pour ne pas pénaliser le travail, auquel cas, il faut beaucoup de cotisants, donc beaucoup d’actifs. 

Soit on veut beaucoup de retraités, auquel cas on explique aux actifs qu’ils se sacrifient à coups de cotisations confiscatoires pour assurer le bonheur des anciens. 

C’est un phénomène de vases communicants que n’importe quel collégien peut comprendre. 

Autrement dit :
  • si la natalité baisse
  • si la population stagne
  • si l’espérance de vie s’accroît
la survie du système de répartition ne peut survivre, à cotisations égales, qu’en repoussant l’âge de la retraite. 

Une autre façon de poser le problème est de dire que la répartition suppose une natalité dynamique dès lors que l’espérance de vie augmente. Sans quoi le système coûte de plus en plus cher.

L’espérance de vie n’a cessé d’augmenter depuis cinquante ans

Nous le montrons dans le graphique en introduction de ce post (qui présente l’espérance de vie pour les femmes) : l’espérance de vie après 60 et 65 ans ne cesse d’augmenter en France depuis cinquante ans. 

Ainsi, en 1960, une Française espérait vivre 16 ans à la retraite. Aujourd’hui, nous en sommes à 28 ans, c’est-à-dire près du double. Entretemps, l’âge de départ à la retraite de plein droit est passé de 65 à 60 ans, péniblement remonté à 62 ans, puis à 64 ans. Et, entretemps, la natalité s’est effondrée. 

Ces quelques paramètres soulignent l’imposture logique qu’il y a à prétendre que l’on peut faire toujours moins d’enfants, au besoin, fermer les frontières à l’immigration, laisser les générations nouvelles commencer à travailler toujours plus tard, et, dans le même temps, ne pas demander aux actifs de travailler plus longtemps pour payer des rentes versées de plus en plus longtemps. On adorerait pouvoir mentir, aux côtés de Mélenchon, de Marine Le Pen et de quelques autres… On adorerait pouvoir dire : mais si, c’est possible. 

Mais on est bien obligé de regarder la vérité en face, fondée sur une mathématique accessible à un élève de CM2.
Les Français méritent leur faillite

Dans des pays sous-développés culturellement, on peut comprendre que ces raisonnements évidents et, au demeurant, choisis, ne soient pas tenus par la population. 

Mais en France… avec un taux de réussite au bac de 85%… comment une réalité aussi élémentaire que celle que nous venons de décrire ne soit pas comprise ? 

Parce que les Français font le choix de l’irresponsabilité. Au lieu de regarder la réalité rationnellement, menés par des démagogues qui préfèrent récupérer des voix là où l’intérêt général exigerait qu’ils assument l’impopularité d’être lucide, les Français préfèrent croire au Père Noël et aux marmottes qui emballent les chocolats dans les papiers d’aluminium.

Quand un peuple dépense plus de 65 milliards € par an pour son éducation, et qu’il se comporte de manière aussi régressive, il envoie un signal simple : il a besoin d’une épreuve, d’une correction. Cette correction s’appelle la faillite. 

Et cette faillite est sur les rails. 

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