Ave Maria - G.Caccini

La Guerre

 

« La guerre c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage, l’ignorance c’est la force. » George Orwell. Nous vivons dans un état de guerre permanent, George Orwell voyait juste, il avait radicalement raison, les temps écoulés depuis ont confirmé sa vision paradoxale des concepts de paix, de guerre, de liberté. L’inversion des valeurs est la base de compréhension des phénomènes qui se déroulent dans nos sociétés.Nous évoluons dans un flux de conflits de tous ordres qui vont de la simple dispute à la plus atroce des guerres.  Simplement, l’information nous présente le spectacle de l’état de guerre alors que la guerre est une permanence fluctuante et pas une explosion brutale ponctuelle. Il n’y a pas de début ni de fin aux guerres puisqu’elles sont l’immanence de la société de l’échange. Pour comprendre les cycles inexorables de l’histoire du monde, il faut comprendre que l’homme, acteur, témoin des événements n’est pas pour grand-chose dans l’apparence même des événements qui rythment l’Histoire. Le déterminisme est la vraie réalité organique de déroulement des événements, le vrai moteur de l’Histoire. 

Les hommes ne sont pas aux commandes, ils nous en donnent l’illusion mais ils ne feront qu’exécuter les ordres d’autres hommes, eux-mêmes dirigés par d’autres et ainsi de suite jusqu’à ce que l’on découvre le vrai décideur, le vrai dictateur : l’Argent, la finance, le Marché, le profit. Rien n’a plus de puissance que cette machine totalitaire mondiale. 

Rappelons-nous ce dicton :

« L’argent n’a pas de maître ».

 

L’héroïsme et le pouvoir : mythe ou réalité ?

Puisque les hommes sont absolument tous à la recherche de leur propre réussite sociale, financière, populaire, chaque homme se dirige vers ce qui pourra lui rapporter le plus, ce qui l’enrichira et le rendra plus désirable, plus respecté, plus célèbre. De nos jours, il n’y a pas d’exception. Dans le passé, il y eut encore, ponctuellement, un héroïsme idéologique de certains chefs, mais changèrent-ils pour autant plus le cours de l’Histoire que le nerf de la guerre ne le fit ? Ce n’est pas certain, les Titus, les Napoléon, les Staline avaient déjà tous un seul et même objectif : le pouvoir pour l’argent, par la force, pour la domination. Régner et écraser l’ennemi pour s’étendre, pour contrôler, pour posséder plus de terres et asservir plus de gens. Posséder plus de trésors pour leur propre satisfaction, leur propre narcissisme et leur propre fortune. Les forces déployées par l’homme sont toujours générées par la puissance des objectifs recherchés.

Il y a la guerre et puis il y a la retransmission de la guerre et toute cette armée de chaînes télé, ces journalistes, toute cette presse qui en vit. On se souvient très bien de la guerre du Golfe début des années 90 et sa retransmission en live 24h sur 24 par la chaîne américaine CNN. Cette chaîne a été créée à l’occasion de cette guerre, il me semble. En tout cas elle s’est rendue célèbre grâce à elle. La guerre du Golfe a également été filmée merveilleusement par le génial réalisateur allemand : Werner Herzog « Leçon de ténèbres » 1992. A découvrir.

Les trois monothéismes ont tous trois leur méthode pour déclencher et entretenir les guerres. C’est curieux, ces trois dogmes exclusifs et intolérants procèdent tous de la même verticalité sacrée, celle de la montée aux cieux et de la descente de leur dieu, de leur messie, de leur prophète. N’est-ce pas la même dynamique de mouvement vertical que l’on décrit lorsque l’on parle de la hiérarchie du pouvoir et de l’escalade des guerres ? Les trois monothéismes qui sont tous trois à la base et à l’entretien de la plupart des guerres sont tous des dogmes utilisés dans la justification des conflits. Ils sont aussi l’excuse de la vengeance, de la réponse à une attaque. Qu’en est-il vraiment ? Ces invocations religieuses ne sont-elles pas des excuses morales qui tentent de justifier des actes de barbarie, des génocides ? La puissance des religions permet-elle de tuer tant de monde ? Allons, nous savons bien que ce ne sont que des excuses morales qui pourront faire passer l’horreur auprès des populations. Au sommet des directions de guerre, les chefs de guerre ont-ils une foi quelconque ? Quelle foi pourraient-ils défendre en commettant de tels actes génocidaires ? L’Église, la Synagogue et la Mosquée autorisent-elles de tels déploiements de force envers des êtres humains qui sont censés être des frères ?

La réalité doit se trouver dans quelque chose comme ceci : Il y a différentes couches de compréhension et de morale. Un bandit, un criminel ne voit pas un meurtre de la même façon qu’un citoyen classique, pour le criminel, tuer est, si pas une routine, un acte supportable et exécutable. Pour un militaire, c’est pareil, tuer est son job. Maintenant, les chefs de guerre, ceux qui sont responsables des ordres de tuer ont des raisons que nous ne connaissons pas toujours mais que nous pouvons deviner. La difficulté pour nous, citoyens classiques, est d’accepter les horreurs qu’ils commettent alors que pour eux, c’est tout à fait normal et même souhaitable. Les chefs de guerre ont leurs raisons et dans leur système hiérarchique d’obéissance aux ordres, ils y obéissent et les exécutent. Quand Orwell dit que l’ignorance c’est la force, il veut dire que dans le système social dans lequel nous sommes inscrits, la force c’est de lutter contre ce système et toute opposition sera bonne. L’ignorance des règles dictées par cette société aliénante est une force. C’est pareil pour la liberté et l’aliénation, nous avons un droit à la liberté, une liberté bien limitée et bien surveillée. Profiter de cette liberté circonscrite dans une société surveillée c’est tout simplement de l’esclavage. Il encourage à la désobéissance en somme, désobéir c’est se libérer. Les temps de paix n’existent pas, ils ne sont que le leurre d’une guerre masquée. Dès qu’elle sera visible, ce ne sera pas parce qu’elle éclate, ce sera parce que les pouvoirs croiront profitables de nous la montrer, alors ils ordonneront à la presse de se jeter sur le gâteau. Un dirigeant des États-Unis ne peut freiner la fabrication et les livraisons d’armes, étant au pouvoir d’un pays dont l’armement est la première économie. Il y a un tel business que s’il arrête une guerre, il est forcé d’en entamer une autre ailleurs uniquement pour ne pas freiner l’économie américaine en faillite.

Religion, morale et conflits : des justifications aux conséquences

Arrêtons l’angélisme en rêvant à des chefs d’État bienfaiteurs et non-violents, tant que l’argent sera aux commandes, c’est lui qui décidera et il n’a pas de frein moral, pas d’état d’âme, pas de religion et la mort ne lui fait pas peur.

Il n’y a jamais une seule cause, une seule raison, elles sont toujours multiples mais l’axe principal, celui qui enclenche les combats sera toujours l’argent, directement ou indirectement. Ne voyons-nous pas que l’attention est focalisée sur un conflit, une maladie ou tout autre événement spectaculaire ? Dès que l’information lasse, dès qu’il n’y a plus rien à dire, que ça s’estompe et que le spectacle ne plait plus autant, une autre guerre éclate, ailleurs. Elles ne sont pas orchestrées, pas préméditées, il n’y a pas un grand complot d’intelligence stratégique qui décide des guerres et qui allume des mèches, non, de nouveau ce ne sont pas les hommes qui dirigent, nous avons du mal à l’imaginer mais pourtant c’est la réalité, ce sont les éléments qui s’entrechoquent, pas les hommes qui agissent. Ils ne représentent pas grand-chose dans tout ce chaos, ils suivent plutôt qu’ils ne précèdent. C’est le Système tel qu’il est devenu qui génère presque automatiquement ces conflits. Les hommes, eux, défendent leurs petites positions et leurs intérêts, ce qui nous donne l’impression qu’ils sont aux commandes. Ils le croient tous, ils croient tenir leur destin entre leurs mains, mais ils ne possèdent rien, c’est le marché qui les tient et pas eux qui tiennent le marché. Le système de l’échange, de l’argent, de la banque est un système qui se nourrit de tous les excès, les excès sont même la condition pour qu’il vivote encore un peu. Les excès n’ont, par définition, aucune mesure, aucune intelligence, aucun respect pour personne. Dans ce système de l’hubris, la guerre est sous-jacente, elle sommeille à peine et s’éveillera dès qu’une commande d’armes tombera.

Pendant que les bombes tombent et que les populations s’embrasent, les vautours de la finance, cachés derrière leurs ordinateurs, attendent le bon moment pour se jeter sur la carcasse et la dévorer. Ce ne sont pas concrètement ces vautours qui fomentent les guerres, mais ils les laissent faire, ils laissent les feux brûler, ne font rien, sont  prévenus avant tout le monde, mais ne bougent pas, ils voient simplement comment ils pourraient en profiter et placent leurs pions, investissent, vendent, achètent. Sans contribuer au déclenchement direct d’une guerre, ils en tirent profit directement ou indirectement. Puis, interviennent les pleurnichards médiatiques qui prennent parti pour l’une des deux causes, ils viennent se lamenter sur les plateaux télé et déversent leur haine et leurs  larmes de crocodile. Tout le monde y trouve son compte et les affaires sont bonnes.

La seule chose qui fait que ça marche et que les gens y croient, c’est la morale de chacun. C’est elle qui nous sensibilise parce qu’on ne supporte pas de voir les horreurs de la guerre et tant que nous y serons sensibles, le système guerre continuera de fonctionner parce que c’est un business, le business qui rapporte le plus avec la drogue, peut-être. Donc imaginer la fin des guerres dans ce monde du profit en faillite, mieux vaut encore aller siffler là-haut sur la colline.

Extrait de : « Philosophie du devenir » à paraître

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Traduisez ici (choix multiples)