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Courses : « Une très forte hausse des prix dans les prochaines semaines, comme jamais vu depuis 14 ans »

 

Le Télégramme : Quels sont les produits qui ont le plus augmenté en un an ?

Lionel Maugain : Selon une étude de l’Institut NielsenIQ, c’est le prix des pâtes alimentaires (sèches comme fraîches) qui a le plus augmenté pour le moment : +11,4 % en moyenne. Mais pour les premiers prix, ça monte à + 42 % ! 

Les produits à base de céréales ou d’oléagineux connaissent aussi une flambée. C’est le cas des huiles (de tournesol, de colza, de palme…) : + 2,6 % en moyenne, mais +11 % pour les premiers prix. C’est une hausse importante pour ce type de produit. Enfin, en n°3, il y a le café, avec +12 % sur les premiers prix. Par ailleurs, nous avons réalisé un panier témoin avec 31 produits de première nécessité dans le cadre de notre « Observatoire de l’inflation » : par rapport à février 2021, le panier coûte 2,4 % plus cher qu’en 2022. C’est une augmentation assez brutale par rapport à février.

C’est donc les personnes les plus précaires qui sont les plus impactées ?

À date, oui, car ce sont les produits de premier prix qui augmentent le plus. Quand on dit que les pâtes de premiers prix ont augmenté de 40 %, c’est une moyenne : dans certains magasins, c’est + 60 %. Et cela va continuer : on s’attend à ce que la moyenne atteigne cette fourchette hausse. Cela va aussi s’étendre aux autres gammes - marques distributeurs et marques fabricants - dans une ampleur qu’on ne connaît pas aujourd’hui.

Comment expliquer de telles hausses ?

Pour les pâtes, il y a eu des problèmes de récolte, notamment au Canada. Pour le café, comme d’autres produits, c’est lié au dérèglement climatique : une vague de gel tardive a détruit une partie des récoltes. On a aussi une demande mondiale qui est de plus en plus élevée. Dans un troisième temps, il y a la hausse des prix de l’énergie. On en ressent que le début des effets : ils vont s’accentuer dans les prochains mois et impacter tous les autres prix. Enfin, il va falloir ajouter à tout cela les conséquences de la guerre en Ukraine, notamment sur le prix des céréales. Ce qui va avoir, là aussi, des répercussions sur beaucoup de produits.

Ce qui vous fait dire que ces hausses ne font que débuter ?

Elles n’en sont qu’à leurs prémices ! Contrairement à ce que l’on pensait, depuis cinq ans, les prix stagnaient en grandes surfaces. Cette inflation est donc vraiment nouvelle. Elle sera très importante, du jamais vu par rapport à tout ce qu’on a connu jusqu’à la précédente crise, en 2008. Il y a quelque temps encore, on nous annonçait 3-4 % de hausse ; ça va être plus que ça. D’autant que les négociations entre la grande distribution et les producteurs ont été rouvertes. Mais jusqu’où ça va aller ? On n’arrive pas à l’estimer. La seule chose que l’on peut dire, c’est qu’on va avoir de très, très fortes hausses des prix de biens de grande consommation, notamment à base de céréales (comme les viandes ou la farine), de produits laitiers, sur le sucre… La hausse des tarifs des matières premières va faire boule-de-neige sur le reste.

Avec la hausse des coûts de production, peut-on craindre une diminution du nombre de promotions dans les magasins ?

Il y a aura toujours des promotions : c’est du commerce et les industriels et distributeurs vont tout faire pour masquer cette période d’inflation sur leurs prix. Par contre, il faudra faire attention à « l’inflation masquée » : sur plus de 10 % des marchandises que l’on a inspectées, le produit en promotion ressortait plus cher avec la promotion que sans. Et il y a fort à parier que cette façon de faire va se multiplier : ils vont réduire les quantités du produit, changer la recette d’un produit en utilisant des ingrédients moins nobles pour dissimuler la hausse… Par ailleurs, on pourrait avoir des déréférencements : le distributeur pourrait décider de retirer des rayons certaines marques car il estime que la hausse est trop importante pour son enseigne et ses clients. Ce n’est pas une pénurie, car ici, c’est volontaire.

Puisque les prix vont augmenter encore plus dans les semaines à venir, faut-il faire des réserves dès aujourd’hui ?

Ça me coûte de dire ça, mais oui. Le consommateur avisé peut profiter des promotions intéressantes sur les produits de grande consommation, comme le papier W.-C., pour faire des réserves. Trois paquets pour le prix de deux, le deuxième à moitié prix… Il ne faut pas hésiter : là, les distributeurs liquident les stocks. À la prochaine livraison, les mêmes produits seront beaucoup plus chers.

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